A69 : Entre pacifisme et activisme, les opposants assemblent les modes d’actions

“Nous continuerons à mobiliser tous les modes d’actions pour que ce projet ne voie jamais le jour”. Telle est la déclaration des associations lors du week-end de mobilisation contre l’A69 à Saix. Scientifiques, militants, agriculteurs et élus se mobilisent à travers différents modes d’actions pour espérer enfin se faire entendre par le gouvernement.

“1500 scientifiques sont avec nous, les élus locaux sont contre ce projet, le monde de l’agriculture nous rejoint. À ce stade là, j’ai envie de vous dire qu’il n’y a même plus besoin de faire de sondage”, affirme Thomas Brail, grimpeur et fondateur du Groupe National de la Surveillance des Arbres (GNSA). À Saix, le 22 octobre, plus de 10 000 individus de divers horizons professionnels, sociaux et culturels se sont rejoints pour s’opposer au projet de l’A69. 

Mettre sa vie en danger, un moyen de lutte à forte résonance

Armés de cordes et de baudriers, les grimpeurs du GNSA, “les écureuils”, occupent les arbres sur le tracé de l’autoroute depuis plusieurs mois. Leur but : ralentir le chantier pour empêcher l’abattage et attendre le jugement des recours juridiques déjà déposés. 80% des habitants du Tarn et de la Haute-Garonne demandent un référendum local et 61% sont favorables à l’abandon du projet. Mais le Gouvernement refuse d’attendre le temps long judiciaire et appuie sur l’accélérateur : “Ce projet ira jusqu’à son terme”, affirme Clément Beaune, Ministre des Transports.

« La radicalisation est une réponse face à l’urgence climatique et la surdité de nos dirigeants. Le gouvernement est responsable des exactions de la jeunesse sur des projets écocides. »

– Thomas Brail, grimpeur et fondateur du Groupe National de Surveillance des Arbres

Face à ce refus de dialogue, plusieurs écureuils entrent en grève de la faim le 1er septembre. 39 jours après et 12 kilos en moins, Thomas Brail est conduit à l’hôpital 24 heures après le début de sa grève de la soif. Il confie : « J’ai voulu faire quelque chose d’impactant auprès de l’opinion publique”. Et les résultats sont fructueux, les travaux ont été suspendus. La trêve des abatteuses n’aura duré que six jours mais les écureuils ne se découragent pas. Ils continuent de se percher dans les arbres sur le tracé de l’A69 malgré les arrestations et les intimidations. 

Autre type d’action : proposer des solutions. Le 1er septembre, Karim Lahiani, paysagiste, en concertation avec l’association La Voie Est Libre, a diffusé à grande échelle un projet alternatif à l’A69. Avec comme mot d’ordre la participation citoyenne : « Il faut que la société civile s’empare du projet, on doit pouvoir requestionner le projet et l’enrichir avec les habitants. Il a vocation à proposer un nouveau récit et libre aux citoyens d’explorer des sujets », déclare Karim Lahiani. Ce projet se divise en trois grands axes :

Karim Lahiani, paysagiste et créateur du projet alternatif : Une Autre Voie !

  • Simplifier la mobilité rurale, avec le réaménagement de la voie ferrée et de la nationale et la création de la première vélo route nationale.
  • Rééquilibrer les relations entre les métropoles et les campagnes en « remettant la ruralité au coeur d’un projet politique ».
  • Une acclimatation écologiste et agricole : pensée avec une seule question en tête : « comment habiter ensemble le territoire avec d’autres vivants ? »

Les scientifiques sortent des laboratoires et s’engagent sur le terrain

Dans une tribune, plus de 1500 scientifiques dont des membres du GIEC demandent l’arrêt du projet. Plusieurs scientifiques sont présents à la manifestation, dont Irénée Frerot, chercheur et membre du collectif Scientifiques en Rébellion. Il vient tout droit de Paris et confie s’être engagé après la grève de la faim des écureuils. “J’ai été touché par leur combat, je m’y suis intéressé et maintenant je le rejoins”.

Irénée Frerot, membre de scientifiques en rébellion

Même si les scientifiques ont une légitimité et une crédibilité, ils ne se sentent pas écoutés par la classe politique. Pour cette raison et face à l’urgence climatique, son collectif organise des actions de désobéissance civile. “On est triste et en colère, on écrit des rapports pour éclairer la décision publique et ils sont balayés, que nous reste-t-il à part la mobilisation ?” demande Irénée Frérot.

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Dès le début, la manifestation se divise en six cortèges colorés, tous créés pour des objectifs différents. Sous le rythme des tambours, le doré s’élance à travers les champs jusqu’à la société de BTP Bardou. Dans la foule, un mégaphone annonce avec joie “le cortège rouge à atteint sa cible”. Une fumée noire se déclare à une dizaine de kilomètres, c’est le cortège rouge. Il a pénétré dans une cimenterie de Carayon BTP et a mis le feu à des camions pour ralentir l’avancée des travaux.

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Antoine Berlinoz, (qualité de photo modifiée*)

Les cortèges se rejoignent. Ensemble, dans un ultime assaut, ils pénètrent dans les locaux de Bardou et mènent des actions de désarmement contre les constructeurs de l’A69. Pour éviter de se faire attraper, la majorité des individus sont vêtus de noir, équipés de cagoules, de masque à gaz, de lunettes de piscine et de parapluie. Ces objets cachent l’identité et protègent des répressions. D’ailleurs, pour éviter le pistage, les militants s’appellent par un surnom et éteignent leurs portables.

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Des talkies-walkies ont permis aux six groupes de se coordonner pour réussir ensemble à atteindre les objectifs dont, la création d’une ZAD à la Crémade. De retour au campement, les efforts collectifs et les allers-retours à la ZAD durent toute la nuit pour éviter le délogement. Des groupes auto-organisés déterrent des barbelés et montent des barricades. Malgré l’odeur nauséabonde du fumier répartie par le concessionnaire, le lieu est aménagé et prend vie. « La ZAD sera un point stratégique pour mener des actions contre le chantier de l’A69 », affirme une militante. 

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Dimanche midi, 2 blindés et une centaine de forces de l’ordre arrivent sur place. Malgré les affrontements et les barrières humaines, la Crémade tombe aux mains des gendarmes. La « CrémaZAD », aurait pu empêcher la poursuite des travaux si elle n’avait pas été délogée. La création de la CrémaZAD au lieu-dit la Crémade, aurait empêché la poursuite des travaux si elle n’avait pas été délogée le lendemain. L’opération Ramdam sur le Macadam a été conduite dans ce but. Sur Blast, Sébastien Mabile, avocat en droit de l’environnement constate que, “tenir un espace permet souvent de le préserver sur le long terme”. L’opération Ramdam sur le Macadam a été conduite dans ce but.

– Luna Guttierez