Le biopic Better Man, signé Michael Gracey (The Greatest Showman), s’attaque à l’histoire complexe et souvent tourmentée de Robbie Williams, une star britannique de la musique pop. Ce long-métrage sorti le 22 janvier dans les salles toulousaines, adopte un parti pris assez audacieux : représenter Robbie Williams sous la forme d’un singe anthropomorphique. Une idée surprenante et risquée mais qui s’avère être un choix plutôt judicieux.
Un singe pour incarner l’humain : un pari réussi
Selon les propres déclarations de Robbie Williams, il voulait que son histoire soit racontée avec une certaine distance tout en conservant une forte charge émotionnelle. Le singe, symbole d’émotion brute et de mimétisme humain, fait ressentir au spectateur une empathie presque immédiate. Cette représentation amplifie la fragilité et les contradictions de Robbie : une bête sauvage en lutte constante contre ses instincts les plus sombres, mais dotée de manies humaines qui le rend identifiable. On en oublierait presque son apparence animale au fil du long-métrage, même si certains gestes ou cris nous ramènent à son identité bestiale, complètement différente des autres. Cela fait écho au décalage que ressentait Robbie Williams entre lui et ses semblables. D’ailleurs, ce contraste entre l’animalité et l’humanité pourrait donner lieu à une réflexion sur les paradoxes de la célébrité : être à la fois adoré et dévoré par le regard des autres, comme une bête en cage.
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Le singe qui représente Robbie Williams, a été créé par l’équipe derrière les effets visuels de la saga La Planète des Singes (d’où la ressemblance flagrante dans les traits de l’animal). L’expertise de l’équipe arrive à rendre crédible les scènes. Au lieu de confier le rôle principal à un sosie approximatif, comme c’est souvent le cas, notamment avec le dernier biopic sur Amy Winehouse, discutable, le film évite le piège de comparaison visuelle. L’utilisation du singe vient gommer cette barrière et permet au spectateur de s’immerger pleinement dans le récit.
Beaucoup d’effets spéciaux
L’utilisation du singe comme avatar de Robbie Williams, laisse place à une certaine liberté artistique rarement vue dans les biopics traditionnels. Les effets spéciaux jouent un rôle central dans Better Man, avec des scènes ou réalité et fiction se confondent. Dans certaines séquences, ce mélange est intéressant mais parfois, cela peut desservir le long-métrage. Par exemple, la scène où la musique Rock DJ prend vie, même réellement filmée dans la rue, manque clairement de naturel. Le résultat est une impression d’artificialité qui rompt parfois l’immersion totale.
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Malgré cela, les effets spéciaux permettent au réalisateur une véritable liberté artistique. Certaines scènes sont puissantes grâce aux effets visuels et aux multiples plans séquences. Notamment lors des moments où les addictions du chanteur prennent le dessus. Ainsi le long-métrage réussit à proposer des scènes mémorables, comme celle de la bataille des singes sur la musique Let me Entertain you. Forte métaphore d’une lutte entre Robbie et ses démons.
L’émotion au coeur du récit
Là où Better Man surprend, c’est par la puissance de son émotion. Les biopics tombent souvent dans le piège d’une reconstitution froide et distanciée, notamment dans le biopic de Amy Winehouse, Elvis ou même Priscilla. Ici, chaque moment semble pensé pour toucher directement le coeur du spectateur. Robbie Williams est pour certains jeunes de la Gen Z, un total inconnu. C’est là que l’apparence bestiale de Robbie est intelligente.
Le show-man se distance du rôle principal, pour mieux accrocher les spectateurs. Voir ce singe danser sur scène, le regard empli de doutes malgré les acclamations, ou pleurer seul dans une loge, crée un sentiment de proximité qui transcende le simple récit d’une star.
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La face cachée de Robbie Williams
Better Man réussit là où beaucoup échouent : révéler l’envers du décor sans pour autant édulcorer la légende. Evidemment on retrouve un Robbie Williams, osé, extravagant et provocateur. On revisite ses débuts dans le boy band Take That un tremplin vers une carrière solo qui a explosé avec ses tubes Angels et Feel. Ces séquences, mises en scène, rappellent les moments où Williams brillait sous les projecteurs. Pourtant, chaque performances cache une réalité plus sombre, d’un Robbie Williams en dépression, hanté par ses addictions, ses insécurités profondes liées à son enfance et son sentiment d’insatisfaction constant. Il veut toujours plus de célébrité, plus d’argent et de reconnaissance. Une abondance qu’il va connaître, mais qui va aussi créer dans sa vie, un vide profond. Il va en oublier les choses les plus importantes, l’amour et la famille.
Malgré son statut de superstar en Europe, il n’a jamais réussi à conquérir le public américain. Better Man aborde ce sujet, en soulignant que son humour et son exubérance, typiquement britanniques, ne correspondaient pas aux attentes américaines.
Finalement, Better Man nous amène à réfléchir sur la célébrité, la quête d’identité et les cicatrices laissées par les attentes sociétales et familiales. Un film authentique aux thématiques auxquelles le spectateur peut s’identifier. Le choix d’incarner Robbie sous la forme d’un singe devient un outil narratif qui enrichit le récit. Un bon moment à passer dans les salles obscures.