Chaque mois de janvier, un défi collectif s’impose doucement mais sûrement dans les esprits : le « Dry January », littéralement « janvier sec », invitant à une pause dans la consommation d’alcool. Et si l’initiative s’adresse à toutes les générations, elle semble trouver un écho particulier parmi les jeunes.
« J’ai gagné en énergie, mais… »
Entoine, 24 ans, s’est pris au jeu. Après des fêtes 2023 clairement placées sous le signe de l’excès, il a décidé de prolonger l’expérience du Dry January pendant trois mois. « J’ai été surpris par les effets positifs : plus d’énergie, un meilleur sommeil et des économies réelles sur mon budget !». Mais une fois cette période passée, il renprends vite ses mauvaises habitudes. « Le plus dur, c’est quand je suis au bar, ou en terrasse avec des amis . C’est résister face à la tentation, et je ne m’en sentais plus vraiment gagnant”.
Un enjeu de santé publique
Pour Stephanie Pierre, conseillère en santé publique, l’engouement des jeunes pour le Dry January est une opportunité à saisir. « La prévention est essentielle. L’alcool reste la deuxième cause de mortalité évitable après le tabac ». Si les jeunes boivent moins fréquemment qu’avant, le « binge drinking », cette consommation excessive en un temps court, inquiète. « C’est destructeur pour le cerveau et la santé », prévient-elle. Elle met aussi en garde contre des compensations parfois maladroites : « Si on arrête l’alcool pour se rattraper sur les sodas, ce n’est pas forcément la meilleure alternative. »
Une récente étude d’Addictions France souligne une autre problématique : les pratiques publicitaires des marques d’alcool. En trois ans, plus de 11 300 contenus valorisant l’alcool ont été analysés sur les réseaux sociaux, impliquant 483 influenceurs. « Pour le lobby de l’alcool, la jeunesse est un public à cibler », déplore la professionnelle. Un marketing délibérément agressif, face auquel les garde-fous législatifs sont encore trop faibles.
Un projet en mal de soutien
Malgré son potentiel, l’initiative manque cruellement de moyens. Porté depuis six ans par des associations comme France Assos Santé ou Addictions France, le projet n’a jamais reçu de soutien financier ou communicatif de la part de l’État. Une situation qui limite son impact, alors même que l’opération séduit chaque année davantage.
« Les jeunes se sont pris au jeu du Dry January. Mais pour qu’il devienne une véritable opportunité de changement, il faut davantage de moyens et une régulation stricte des publicités pour contrer les manipulations des lobbys », plaide la conseillère en santé publique. Reste à savoir si la volonté politique suivra cette initiative citoyenne.