Alors qu’à Toulouse, les premiers chants de la manifestation se font ressentir, Adrien, jeune buraliste dans le quartier de Saint-Cyprien est admiratif : « Je suis heureux de voir autant de monde réuni pour une même cause. On parle souvent du fait que nous sommes devenus égoïstes, mais c’est bien la preuve du contraire. Cette réforme nous concerne tous, donc je suis satisfait de voir qu’on essaye de faire bouger les choses. »
Cela fait une dizaine d’années qu’il est buraliste, et comme pour tous les autres Français, il est impacté par la réforme des retraites. Il se lève, du lundi au dimanche, à 7h du matin pour faire tourner son bureau de tabac jusqu’à 19h, et ça, tout seul. » Qui va faire tourner la boutique si je pars manifester ou si je suis malade ? Personne. Chaque année, je dois prendre 2 semaines de vacances, mais hormis ça, c’est du 24/24, 7/7 « , rétorque-t-il. Et c’est le cas pour beaucoup de buralistes en France qui souffrent de conditions de travail plutôt rudes.
C’est l’impression que partagent Adrien et Robert. Ce dernier est buraliste dans le quartier de Compans-Caffarelli. « C’est l’usine parfois, les mêmes gestes, les mêmes journées, encore et encore. Et l’on m’apprend que pour toucher ma retraite, je vais devoir travailler 2 ans de plus ? Un peu de sérieux. Si je pouvais sortir dans la rue pour me plaindre de cette réforme à la c*n ? Je serai sorti bien avant.«
« Tout ça pour toucher des clopinettes en plus »
Du côté de Jeanne d’Arc, c’est Laurent qui est tout aussi admiratif du mouvement de foule que la réforme a créé depuis le 19 janvier. Lui travaille aussi du lundi au dimanche avec sa femme. « Au moins, ça me permet de la voir« , dit-il en rigolant. Il aurait aimé participer à la manifestation, mais se sent coupable de le faire, car il devrait laisser sa femme seule s’occuper du bureau de tabac.
« Bien sûr que cela me dérange de travailler 2 ans de plus pour toucher l’entièreté de ma retraite, vous savez pour combien je travaille à la journée ?« , dit-il d’un ton relevé. Sur un paquet de cigarettes, l’état récupère en tout 83% du prix. « Sans mauvais jeu de mots, je fais ce métier pour des clopinettes, ce sont 60 centimes de marge que j’ai, sur un paquet à 10 euros. Bien sûr que je suis énervé contre l’Etat qui m’oblige à travailler 2 ans de plus dans ma vie alors que je devrai profiter de ma retraite« , ce sont les derniers mots sur sa situation que Laurent adressera avant de retourner au travail.
Pour la plupart des buralistes en France, la situation est critique, comme l’ensemble des auto-entrepreneurs d’ailleurs.