Au cours des dix dernières années, les infrastructures produisant de l’énergie verte ont été fortement développées en Occitanie. Le conseil régional souhaite que l’Occitanie obtienne d’ici 2050 le statut de région à énergie positive. Même si le développement de ces énergies est constant, le chemin à parcourir pour atteindre les objectifs de 2050 est encore bien long.
Carole Delga, présidente du conseil régional d’Occitanie, a annoncé en 2017 son intention de faire de la région la première en Europe avec le statut énergie positive (REPOS). Les objectifs de ce projet sont de se reposer essentiellement sur les énergies renouvelables pour produire chaleur et électricité, ainsi que de diminuer la consommation d’énergie dans certains secteurs. Un plan dont l’aboutissement est prévu pour 2050.
Alors quel est le bilan des énergies renouvelables en Occitanie aujourd’hui ? Afin de constater les progrès effectués, la rédaction du 24 Heures a décidé d’étudier l’évolution de la production d’énergies vertes dans la région sur les dix dernières années. Des recherches basées sur les bilans dressés chaque année par l’Organisme Régional de l’Énergie en Occitanie (OREO). Les données stables les plus récentes datant de 2018, l’étude a été portée sur la période 2008-2018.
L’hydroélectrique laisse la place aux autres sources renouvelables
Le partage de la production électrique entre les différentes énergies renouvelables a nettement changé entre 2008 et 2018. Si l’énergie hydroélectrique reste la principale source d’électricité en Occitanie, celle-ci a laissé place à d’autres éléments naturels. Ainsi, sur la production globale d’électricité d’origine renouvelable en Occitanie, la quantité d’électricité produite par les barrages a diminué de 21,1% entre 2008 et 2018.
D’autres énergies se démarquent à présent. L’éolien a connu un bond de presque 8% en dix ans, plusieurs sites éoliens ayant été construits depuis 2008. L’évolution la plus remarquable reste celle du photovoltaïque. Presque insignifiante il y a une dizaine d’années, cette énergie représente en 2018 une part conséquente de la production d’électricité d’origine renouvelable, soit 2 216 GWh (GigaWatts/heure). La production d’électricité par la biomasse n’a quant à elle presque pas évolué, à peine 0,4% d’augmentation en dix ans.
En 2011, l’hydroélectrique chute nettement et les autres sources se développent
L’énergie hydroélectrique dépend énormément des conditions de pluviométrie dans sa production. En cas de fortes pluies, il faut envisager un risque de surproduction et d’endommagement au niveau des barrages. Au contraire, en cas de sécheresses, il y a des risques que les centrales hydroélectriques ne puissent plus produire un rendement suffisant. En 2011, l’Occitanie a été frappée par d’importantes vagues de chaleur.
Plusieurs départements avaient été placés cette année-là en état de catastrophe naturelle. De nombreuses exploitations agricoles avaient été impactées. Des arrêtés préfectoraux avaient également été mis en place pour limiter l’usage de l’eau. Cette même année, les centrales hydroélectriques d’Occitanie ont produit 28% d’électricité en moins que l’année passée, passant de 10 800 GWh en 2010 à 7 700 GWh en 2011. Cette baisse de rendement est advenue alors que l’hydroélectricité était en pleine croissance entre 2009 et 2010.
On peut cependant remarquer d’autres changements sur l’ensemble des énergies renouvelables. En effet, alors que l’hydroélectricité connaît une chute de production, on peut constater un bond plus ou moins important dans la production d’électricité par les autres sources. L’exploitation de l’électricité photovoltaïque a augmenté de façon fulgurante entre 2010 et 2012, passant de 114 GWh à 894 GWh en moins de deux ans. Cette croissance n’a cessé d’augmenter depuis.
L’énergie éolienne a également été développée. Il est possible de constater sa croissance plus ou moins régulière sur les dix années étudiées. Aujourd’hui, l’Occitanie compte plus de 180 parcs éoliens et représente 10,5 % de la production d’énergie éolienne au niveau national selon l’OREO. La production d’électricité par bioénergie (bois, biogaz) n’a quant à elle presque pas évolué, passant de 316 GWh à 545 GWh entre 2008 et 2018.
En 2018, L’hydroélectricité a connu son plus important rendement d’énergie depuis 10 ans avec 12 340 GWh. Cette source renouvelable reste la plus importante en Occitanie, bien que l’on puisse constater le développement des autres moyens de production électrique. Afin d’atteindre l’objectif fixé par le conseil régional, la production d’électricité par des sources renouvelables devra être multipliée par trois.
En se basant sur les chiffres de 2018, cela demanderait un minimum de 54 000 GWh générés par an dans la région. Selon nos calculs et d’après l’estimation qu’un foyer français consomme en moyenne environ 0,005 GWh par an (données RTE), une telle quantité d’énergie permettrait d’alimenter simultanément l’équivalent de 10 800 000 foyers. Il s’agit là évidemment d’une estimation ne prenant pas en compte de nombreux éléments du réel et servant simplement à visualiser la puissance électrique envisagée.
Afin d’atteindre de tels résultats d’ici trente ans, l’hydroélectricité ne suffira sans doute pas, et les autres sources d’énergies renouvelables sont encore peu exploitées en comparaison. La production électrique de ces énergies augmente bien, mais en termes de rendement celles-ci restent loin en dessous de l’hydroélectricité. Une énergie qui produit en grande quantité, mais qui a aussi connu de fortes irrégularités de production au cours des dix dernières années.
Une inégale production des énergies thermiques
Pour ses prévisions en vue du projet REPOS 2050, la région compte sur le développement des techniques actuelles d’isolation des bâtiments . Celles-ci devraient réduire considérablement les besoins en chauffage avec pour certains bâtiments la disparition totale de chauffage hormis en appoint en cas de problème. Le chauffage centralisé sera donc beaucoup moins utilisé et laissera place à des installations individuelles beaucoup plus souples d’usage.
Sur la période 2008-2018, le bois énergie représente la quasi-totalité de la production. Sa part a même augmenté pour passer de 93 % à 94,4 %. Ce sont ainsi 425 000 tonnes de bois qui ont été consommées en 2018. La forêt composant 36 % du territoire régional, cette source est exploitée au maximum. Mais avec l’utilisation du bois se pose la question de l’impact écologique. Une partie du bois utilisé provient ainsi des déchets de scieries et est donc local et peu polluant. Pour le reste, le bois est déchiqueté grâce à un processus qui, comparé aux énergies fossiles, consomme moins d’énergie.
Le transport est également moins important, la production étant locale. Les forêts dont sont issues ce bois ont un processus mis en place pour prévenir les incendies. Et la gestion de la forêt se fait de façon durable. En ce qui concerne les émissions de CO2 lors de la combustion du bois, celles-ci sont captées par les arbres de la forêt. Arbres plantés afin de remplacer ceux utilisés pour le bois.
Les autres énergies déjà présentes comme la géothermie ou le solaire thermique n’occupent qu’une part insignifiante de la production de chaleur. Elles semblent plus ou moins délaissées au profit du bois énergie. Mais l’objectif annoncé par le conseil régional est pourtant bien de faire progresser ces chiffres d’ici 2050. En effet, leur rôle sera majeur pour permettre aux énergies renouvelables produites dans la région de dépasser la consommation. Pour aller dans ce sens, une énergie a en revanche fait son apparition : le biogaz injecté. Sa part dans la production est cependant quasi nulle puisqu’elle ne représente que 0,1 %.
Un développement contrasté
La production du bois énergie est très largement supérieure aux autres sources. Elle a encore augmenté entre 2008 et 2018, passant de 9 618,28 GWh à 11 743,24 GWh en dix ans. Cette augmentation n’a pas été constante puisqu’il y a eu en 2011 et 2014 des baisses de production. Mais son exploitation a toujours été bien supérieure aux autres.
Les autres énergies justement n’ont pas de différences majeures entre elles dans leur quantité de production. En vue du REPOS 2050, la région veut essentiellement développer le solaire thermique. Le chemin reste encore long puisque puisqu’en dix ans la production n’a augmenté que de 127 GWh environ. Elle est passée de 113,54 GWh à 240 GWh.
La production de géothermie a quant à elle clairement stagné. Après deux années stables, une très légère diminution s’est produite avant une augmentation tout aussi minime. Au final, la production n’a augmenté que de 10 GWh. Un chiffre qui interpelle puisqu’il s’agit d’une des énergies à développer en priorité. Les biocarburants, eux, ont même diminué sur cette période passant de 441,86 GWh à 151,16 GWh. Mais cette source ne sera que peu utilisée en 2050. Seuls certains produits de l’agriculture et de la transformation agroalimentaire en bénéficieront. Cette baisse n’est donc pas alarmante.
Les biogaz ont eux connu une évolution progressive. Partant d’à peine 13 GWh pour ceux qui permettent la valorisation thermique (leur combustion engendre de la chaleur), leur production a augmenté année après année pour atteindre les 72,09 GWh. Mais depuis 2015, aucune évolution, la production reste la même.
En 2018, de nouveaux biogaz ont également fait leur apparition, ceux injectés (injection dans le réseau de gaz) qui sont produits à hauteur de 7,2 GWh. Un chiffre relativement faible. Problème : cette énergie est le point culminant du projet. C’est elle le fer de lance de la transition énergétique. Sa production est censée atteindre les 4000 GWh en 2050. Le compte est encore loin d’y être pour l’instant.
Une production d’énergie pas forcément en accord avec le projet REPOS
C’est donc le bois sans grande surprise qui est la source d’énergie la plus produite en Occitanie. Avec 11 743 GWh produits en 2018, il représente 94,4% de la production thermique globale. Et entre 2008 et 2018 ce sont 124 116,86 GWh de bois énergie qui ont été exploités. Un chiffre écrasant comparé à la seconde ressource la plus produite, le solaire thermique, qui est 58 fois inférieur au bois énergie en termes de production. Les chiffres de cette énergie restent très faibles avec 2 128,89 GWh produits en dix ans.
La troisième place est en revanche beaucoup moins cohérente. Il s’agit en effet des biocarburants avec 2081,37 GWh produits entre 2008 et 2018. Mais leur exploitation est loin d’être la priorité puisqu’ils n’interviendraient que pour certains produits agricoles. Preuve que la production des autres énergies doit clairement augmenter.
A noter que le biogaz arrive en dernière position avec 527,33 GWh. Il s’agit pourtant de la priorité en termes de développement pour le projet REPOS 2050. Une accélération du processus d’exploitation et de production devrait donc être déployée les prochaines années pour remplir le contrat.
L’objectif 2050 difficilement envisageable si le développement ne s’accélère pas
Ainsi, que ce soit pour l’électricité ou la chaleur, le constat est similaire. Une unique énergie concentre à elle seule une très grande partie, voire quasi l’entièreté de la production. L’hydroélectricité a ainsi atteint un chiffre record en 2018 avec 12 340 GWh produits. Cette énergie représente 67,2% de la production, même si sa part a diminué. Un chiffre qui permet aux énergies renouvelables de représenter 47,7% de la production électrique de la région. Dépasser la part des énergies fossiles d’ici 2050 ne devrait donc pas poser de problèmes. Il faudra en revanche augmenter l’exploitation des autres énergies pour que la production dépasse les besoins en consommation de l’Occitanie.
La région compte sur une diminution très conséquente des besoins en chauffage d’ici trente ans grâce aux techniques d’isolation des bâtiments. Malgré cette prévision, pour atteindre les objectifs de REPOS 2050, il est primordial de se concentrer dès à présent sur les énergies hors bois. Car c’est grâce à elles que ce plan pourra être réalisé.
A ce stade, certaines énergies comme le biogaz vont devoir également être plus exploitées, afin d’atteindre les 4000 GWh par an prévus pour 2050. Malgré la transition déjà entamée, le travail reste donc encore colossal pour les trente prochaines années.