Mardi 15 janvier, l’accord sur le Brexit présenté par Theresa May a été largement rejeté (432 votes contre, 202 pour) par le Parlement britannique. En ces temps de confusions et d’incertitudes pour l’avenir du Royaume-Uni et de l’Europe, Le 24 heures est parti à la rencontre de ces expatriés anglais qui vivent à Toulouse.
Si vous êtes un passionné de rugby, son nom vous est peut-être familier : Jamie Soon, ancien joueur professionnel de rugby dans l’équipe nationale anglaise puis au CA Brive, habite en France depuis presque dix ans. Installé dans la ville de Corrèze avec sa femme et ses trois enfants et travaillant depuis presque 6 ans à Toulouse (actuellement comme agent sportif chez Sport Session), le Britannique a pris peur lors de l’annonce du Brexit en 2016. Dès lors, il a décidé d’entamer les démarches pour se faire naturaliser français :
« Je ne savais pas…, ça allait peut-être être plus facile de voyager en Europe avec un passeport français qu’avec un passeport anglais après le Brexit, donc je me suis dis que pour éviter le visa il fallait que j’essaye d’en avoir un ».
Contre la sortie de l’Europe, Jamie Soon regrette néanmoins le manque d’informations, les mensonges et la confusion constante sur ce que vont devenir l’Angleterre et cette dernière (notamment lors du premier référendum) : « Je pense qu’on n’avait pas les bonnes informations et tout le monde a menti pour essayer de gagner un peu de pouvoir dans le monde de la politique. Tout le monde était dans le flou, tout le monde a crû que ça allait être comme ça ou comme ça et au final ce n’était pas le cas ». En effet, pour l’agent sportif, la désinformation et/ou la non information ont favorisé un vote positif au départ qui aurait pu être évité : « moi je pense qu’il y en a plein qui ont voté pour partir qui n’ont pas eu les vrais chiffres, les vrais faits etc et maintenant ils se rendent compte que ça ne va pas se passer comme ils l’imaginaient et ils regrettent ».
Et quand on évoque le monde du rugby qui lui est si cher, une question essentielle concernant directement les joueurs reste en suspens dans son esprit : « Pour les anglais qui veulent jouer en Europe, est-ce qu’il va falloir faire un visa comme les Fidjiens ? Et vice-versa ? » . Jusqu’alors, tous les rugbymen européens pouvaient jouer en Angleterre sans faire de demande de visa, car ils n’étaient pas considérés comme étrangers, contrairement aux Australiens et autres Néo-Zélandais. Une règle qui va peut-être être remise en cause mais sur laquelle rien n’a encore été annoncé, comme sur beaucoup d’autres sujets, un fait qui désole le français de coeur : « pour moi c’est ça le truc avec le Brexit : personne ne sait où on va ». À ses yeux, l’échec de l’accord présenté par Theresa May est à l’image de la crise politique que traverse son pays outre-manche, « pour moi, ça montre que c’est un peu la pagaille ! », une situation qui laisse l’anglo-saxon pessimiste quant à l’avenir de son pays.
« Je reste contre le Brexit, contre l’accord de Theresa May »
Matthew Harrisson est étudiant et habite dans la Ville rose depuis environ 4 ans. Contrairement à Jamie qui pensait ne pas pouvoir voter (alors qu’il en avait parfaitement le droit), il a opté pour le « non » au premier référendum du Brexit car pour lui « Aujourd’hui il est plus important de tisser des liens que de s’éloigner de nos alliés et s’isoler » et depuis 2016, Matthew n’a pas changé sa position : « Mon avis n’a changé en rien. Je reste contre le Brexit, contre l’accord de Theresa May, contre l’idée de sortir sans accord. » L’avis de Jonathon (étudiant en M2), qui n’a pas pu voter lors du premier référendum, est bien plus nuancé : « Je suis de deux avis : je trouve ça bête de sortir de l’EU à ce moment, l’idée en soi de l’EU je trouve ça top. Mais en même temps, je ne suis pas du tout d’accord avec la façon dont elle marche en ce moment, notamment les députés, le nombre, qui peut l’être, ce qu’ils font etc… donc le fait que le Royaume-Uni dise « stop on en a marre » c’est pas totalement mauvais ».
Cet échec de Theresa May, Matthew s’en réjouit ouvertement et lui donne même une lueur d’espoir : « J’espère qu’il nous met sur le chemin d’un deuxième référendum pour renverser le Brexit ». Et quand la question de ce nouveau référendum se pose, la réponse est unanime chez les trois expatriés qui comptent bien faire entendre leurs voix, et voter contre le Brexit. Tout comme Jamie, Matthew est persuadé que ce vote, ce sera le « stay » (rester en français) qui l’emportera : « vu ce qui s’est passé depuis et les changement démographiques, on a des chances de finir avec un résultat positif pour rester ».
Pour l’heure, deux choix se présentent à la Première ministre anglaise : retourner négocier auprès de Bruxelles ou demander un report de la date officielle du Brexit, prévu le 29 mars prochain.