Décryptage de campagne : François Fillon et la droite providentielle

À l’approche de l’élection présidentielle, les différents candidats commencent à sortir leurs affiches, clips de campagne ou logos, l’occasion pour le24heures.fr de lancer une série d’analyses. Avec Frédéric Delrieu, directeur de l’agence de communication Novo à Toulouse, nous allons décrypter, candidat par candidat, les éléments de langages ou iconographiques qu’ils utilisent. Pour le deuxième épisode : François Fillon.

Au cœur de la tourmente depuis déjà trois semaines, François Fillon persiste et signe – pour l’instant – il reste le candidat de la droite et du centre à l’élection présidentielle 2017. Si pour l’instant, il n’a dévoilé que son logo et son affiche de campagne, force est de constater que le timing joue contre lui puisque les différentes affaires révélées notamment par le Canard Enchainé et Médiapart sont en opposition totale avec son slogan.

« Bon bah, c’est sûr que là après coup, au vu de ce qui a été dévoilé sur lui ça change tout », commence Frédéric Delrieur. Il est vrai que François Fillon a le don pour se mettre dans la panade tout seul. Actuellement empêtré dans des histoires judiciaires liées à des détournements de fond, François Fillon a réussi à jouer à l’arroseur arrosé tout seul avec une affiche de campagne censée le démarquer des autres candidats qu’il décrit implicitement comme étant des menteurs. Le courage de la vérité. Une phrase forte devant vanter ses qualités d’homme honnête. Une douce ironie au vu de la situation. .

« En soit il faudrait qu’il fasse disparaître cette affiche », annonce le directeur de l’agence Novo. « Le problème, c’est que s’il la fait retirer, ça sera vu comme un aveu. Mais en même temps la laisser, c’est offrir une possibilité de moquerie à ses détracteurs », analyse-t-il. Un sacré dilemme donc pour l’ancien Premier Ministre qui se retrouve donc pris au piège de son propre slogan. 

Photo de Président et clichés d’homme de droite

« La première chose marquante sur cette photo, c’est son côté présidentiel. Tous les codes y sont, le drapeau tricolore, la photo prise dans un parc, le cadrage, etc », indique Frédéric Delrieur. Un petit avant-goût de la photo que François Fillon souhaiterait prendre dans les jardins de l’Élysée donc. Une photo qui semble toutefois compromise. Mais les éléments d’une photo présidentielle ne sont pas les seuls puisque le candidat a aussi pensé à incorporer dans cette affiche toutes les caractéristiques du candidat de droite, quitte a verser dans le cliché. « La chemise bleue, le pantalon en toile beige bien cintré, une grosse montre, un grand et beau sourire et surtout les manches retroussées pour montrer qu’il est sur le terrain », décrypte ainsi le professionnel de la communication. Et effectivement, François Fillon a sur cette affiche un visage avenant, donnant confiance, bien loin du visage austère auquel le candidat a habitué les Français. Une vraie affiche d’homme présidentiable donc qui sans ce scandale aurait pu être véritablement sérieuse. Mais au vu de la situation, cette affiche semble faire plus de mal qu’autre chose au candidat de la droite et du centre.

Une bien mauvaise communication lors du Penelope Gate

Depuis la sortie des premières accusations à son encontre, François Fillon n’avait que trois options : nier, avouer ou avouer en trouvant une justification suffisamment bonne pour se faire épargner par l’opinion publique. Et visiblement, le candidat et son équipe de communication ont pris le parti de nier. Pas forcément une bonne idée quand l’on pense à la manière dont le Sarthois a se fait lyncher de toute part depuis. Pourtant, il existait une solution potentiellement moins dévastatrice pour lui selon Frédéric Delrieur. « Il lui aurait suffi d’avouer, mais de le faire d’une manière attirant la sympathie. Comment ? Tout simplement en s’adressant aux femmes en premier, avant même de parler aux Français. Combien de femmes en France travaillent avec leurs maris ? Combien d’autres soutiennent leur homme dans ses projets, l’aident dans son entreprise ou tout autre chose similaire. Et parmi ces femmes, de nombreuses ne sont même pas officiellement employées, elles travaillent simplement avec lui », explique le communicant avant de poursuivre. « Il aurait fallu que François Fillon leur dise : depuis plus de trente ma femme est à mes côtés, elle m’a toujours aidé, soutenu et fait tant de choses pour moi, allant même jusqu’à s’effacer. Alors oui, un jour, j’ai eu la possibilité de lui verser un salaire pour la remercier encore une fois de tout ce soutien et je l’ai fais. C’était illégal, je le sais, je n’aurai pas du, c’est vrai, mais je l’aime et je voulais lui le montrer. En tant que femme, ne comprenez-vous pas que la mienne ait apprécié le geste, cette reconnaissance à son soutien et son travail ».
Une ligne de défense honnête – ou du moins qui en donne l’air – avec un véritable argumentaire, parlant d’un sujet dont bon nombre de Français connaissent la problématique et qui aurait pu être ainsi beaucoup plus souple avec le candidat. Mais François Fillon a préféré nier, à ses risques et périls.

 

 

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